TENDACHËNT « Ori Pari »

Folkclub  Ethnosuoni, 2000

MUSIQUE DU MONDE

MT6183 (disponible sur commande)

Maurizio Martinotti, multi-instrumentiste de Tendachënt et de La Ciapa Rusa

Maurizio Martinotti est sans doute le meilleur représentant de la World Music italienne.

Multi-instrumentiste vraiment doué et inspiré, il s’est mis à collecter des musiques traditionnelles dans le répertoire piémontais (Italie du Nord). Nous pouvons les écouter sur les nombreux albums qu’il a enregistrés avec ses diverses formations.

Personnellement, je suis étonné de l’activité incroyable que mène cet artiste pour faire découvrir la musique du Nord de l’Italie.

C’est lui qui a été à la base de la redécouverte de la vielle à roue italienne (ghironda), dont il enseigne la technique à Turin. Il produit de nombreux groupes piémontais et italiens, avec lesquels il joue divers instruments traditionnels. Nous en possédons d’ailleurs quelques uns à la Médiathèque (Albums avec Maurizio Martinotti).

Il est aussi le directeur d’un des plus importants festivals folk italiens, le Folkermesse.

Il serait long de dire tout ce que cet artiste réalise afin de faire connaître et apprécier la musique du Nord de l’Italie.

Toutefois, j’ai particulièrement apprécié une de ses formations les plus connues en Italie, La Ciapa Rusa,  et plus précisément leur meilleur album Retanavota (avec la voix sublime de Donata Pinti).

Lorsque le groupe a disparu en 1995, Maurizio Martinotti a formé le groupe Tendachënt, en 1997, dans la ligne artistique de son ancien groupe : des musiques et chants traditionnels revisités et joués avec des instruments anciens et contemporains.

Et comme pour La Ciapa Rusa, les morceaux sont souvent des traditionnels « collés » l’un à l’autre pour rendre la ritournelle plus variée, dansante mais aussi mélodieuse.

La langue piémontaise se marie agréablement à ces rythmes et à ces couleurs que le groupe nous livre.

Cependant, Tendachënt est un groupe d’hommes et leur chant n’est en rien comparable à la voix chaude et parfaite de la chanteuse de La Ciapa Rusa.

Restent les musiques traditionnelles : des gigues, des scottish, des valses… Un vrai plaisir !

« ORI PARI », premier album de Tendachënt

La première chanson de l’album, Nsumma al pont ad Mantua, est une douce mélodie qui s’emballe dans ses parties instrumentales. On y entend l’histoire d’une jeune servante violée par un chevalier français et qui se suicide pour laver son honneur. Violons, flûtes, batterie, vielle, … nous entraînent à la danse. Cette chanson se trouvait également sur l’album Retanavota de La Ciapa Rusa.

Comme dans beaucoup de vieilles chansons françaises, on retrouve ici aussi cette forme musicale : une mélodie douce, autour d’une légende ou d’une histoire triste, suivie d’une danse qui lui donne un sens. Peut-être la danse profane qui lave le péché, qui transfigure la douleur, qui permet de se délivrer du malheur. La mort, le viol, la séparation, le regret finissent toujours par la danse, une danse pétrie d’amertume, de douce tristesse…  Pour moi, cela me fait penser directement à Malicorne avec L’écolier assassin, à Maluzerne avec Le Roi Louis ou même à J.J. Goldman avec son tube  Tournent les violons.

L’instrumental qui suit (Tasso Barbasso/Centi) commence d’abord avec les percussions. Puis la vielle et le violon entament une série de deux scottish délicates, composées par Martinotti mais qui pourraient facilement s’ajouter au répertoire piémontais. Impossible de ne pas avoir les pieds qui bougent, même quand on n’est pas habitué aux bals folk. Rappelons que la scottish est une danse traditionnelle, n’ayant aucun rapport avec l’Ecosse, qui se danse en couple et qui est vraiment très populaire en Belgique également.

Galantone est une chanson traditionnelle piémontaise se rapportant à la dot d’un mariage. Les voix se répondent dans le couplet et s’unissent dans le refrain. Une ritournelle agréable, sans prétention, jouée entre autres à la mandoloncelle et à la vielle.

Le quatrième morceau de l’album débute par une douce valse à la flûte. Puis arrive une autre valse, plus impétueuse. Elle évoque la mer de Moaña (on reconnaît de suite les rythmes espagnols). Ensuite, les deux valses suivantes permettent au morceau d’aller crescendo (tant dans l’instrumentation que dans le rythme).Impossible encore de ne pas virevolter à l’écoute de cette suite de valses.

Vallée de Borbera

Commencée a capella, la chanson rituelle pour le mois de mai est suivie par une gigue soutenue, suivie elle-même d’un chant rythmé de la vallée de Borbera. La suite se termine avec une courante endiablée (la courante est une danse…)

Re Gilardin, conte l’histoire tragique d’un jeune roi qui revient de la guerre pour mourir dans les bras de sa mère. Celle-ci omet d’informer sa belle-fille de la mort du souverain. Petit à petit, cette dernière nourrit des soupçons et réalise ce qui s’est passé. Cette chanson douce à la mélodie fine se trouve aussi sur le CD de La Ciapa Rusa « Ten da chent l’archët che la sunada l’e longa ». Personnellement, j’aime bien les deux versions.

Comme la précédente, cette chanson est une reprise qu’on peut entendre encore sur le même album de La Ciapa Rusa. Toutefois, l’instrumentation est plus rythmée et mieux produite. La fin de la partie instrumentale possède un rythme très rapide, vivant et dans l’esprit Folk Revival. Un des meilleurs morceaux de l’album.

Il frate cappucin/Principessa/Mazurca est une suite, comme on en trouve souvent sur cet album. La chanson raconte l’histoire d’un frère capucin qui vient visiter une jeune servante pour soi-disant la confesser. Mais il est son amant… Une gentille chanson qui fait la part belle aux voix de Tendachënt. La mazurka qui suit est délicate (on a l’impression d’entendre parfois le couplet d’Embrasse-les tous de Brassens !). La deuxième mazurka jouit d’une instrumentation plus complète sans pour autant perdre sa légèreté.

La dernière plage de l’album nous offre une légende d’Alexandrie (la ville du Piémont). Draghin était un musicien populaire qui disait avoir tué ses sept femmes, sans pitié. D’abord emprisonné, il fut pardonné et, de retour d’exil, il s’installa à Milan, où il devint un riche musicien. Suit une gigue et une danse traditionnelle, monferrina, qui clôt l’album.

Un CD qui chante la tradition du Nord de l’Italie et qui fait danser. L’instrumentation est parfaite, les voix sont acceptables sans être vraiment touchantes. Quelques plages de Ori Pari sont de vraies perles. Et cela me donne furieusement l’envie d’écouter leur nouvel opus, « Arnéis » (MT6185). DM

(Disponibilité de ce CD)

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